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Arrêt regrettable contre Obwald

L'impôt dégressif a été aujourd'hui remis en cause par le Tribunal fédéral. La concurrence fiscale, cependant, ne devrait que peu en souffrir.

Ainsi donc, le TF a considéré les impôts dégressifs comme anticonstitutionnels, se basant sur la notion de « capacité économique » que l'impôt dégressif ne satisferait pas, suite à un recours lancé par Josef Zisyadis, finalement appuyé par trois citoyens d'Obwald.

C'est le recours de ces derniers qui été accepté, celui du Vaudois et éphèmere Obwaldien ayant été jugé irrecevable. Si cette décision est regrettable, l'enjeu décisif, cependant, est bien ailleurs : que le système d'impôt soit progressif, plat ou dégressif, ce sont bien les taux pratiqués qui comptent le plus.

Le problème du principe de la « capacité économique », en effet, est qu'il ne dit strictement rien du degré de progressivité, mais nous indique simplement, dans une interprétation logique, que les « riches » doivent payer plus que les « pauvres ».

Le seul cas où il ne serait dès lors pas respecté serait si un système fiscal prévoyait que des contribuables au revenu plus élevé payent moins que des contribuables au revenu plus faible. Or, ce n'est absolument pas le cas à Obwald : ce qui décroît à Obwald, ce n'est pas le montant d'impôt payé, mais uniquement le taux pratiqué sur certaines tranches de revenu.

Considérer qu'il soit justifié que les riches doivent payer de plus en plus non seulement en termes absolus, mais aussi en termes relatifs par rapport à leur revenu, est tout aussi arbitraire que le serait, par exemple, de reprocher à l'impôt progressif de ne pas croître exponentiellement. Car après tout, puisque « payer plus » semble avoir un sens évoluant dynamiquement, pourquoi ne pas considérer, en effet, que l'impôt progressif est également injuste envers les pauvres, puisqu'il croît à un taux de plus en plus faible, et finalement atteint généralement une limite (de sorte que quel que soit le revenu, le montant d'impôt ne dépasse jamais une certaine part de ce revenu) ?

Si la définition de « payer plus d'impôts » semble donc évoluer avec la perception politique pour s'éloigner de la définition «normale» (qui correspond simplement au fait de payer davantage en termes de francs), la notion de « capacité économique », elle aussi, répond à une question politique, qui est de savoir s'il est justifié que les riches payent de plus en plus, de plus en plus avec un taux de plus en plus élevé, ou même de plus en plus avec un taux croissant de plus en vite. Le choix entre ces différentes définition de « payer plus », semble bien être différent selon les perceptions cantonales, et ne saurait dès lors se résumer à une interpétation faite par quelques juges, tout érudits qu'ils soient. En ce sens, c'est bien la remise en question du choix de 86% des électeurs Obwaldiens, qui avaient plébiscité la nouvelle loi fiscale, qui laisse songeur.

Mais au-delà de cette question, c'est le principe de capacité économique qu'il conviendrait de remettre en cause, quitte à le supprimer de la Constitution. Après tout, si le principe de capacité contributive devait avoir un sens clair, il faudrait en effet l'interpréter comme : chacun paye selon ses moyens, autrement dit, chaque contribuable peut garder un revenu donné de subsistance, et cède tout le reste de son revenu au fisc.

Le communiste Josef Zisyadis, auquel le Tribunal fédéral donne raison aujourd'hui, est, lui, cohérent sur ce point : il a proposé récemment au Parlement de fixer un revenu minimum de 3 500 francs et un revenu maximum de 35 000 francs. Cela serait tout à fait dans la logique de la notion de capacité économique : de chacun selon ses moyens, et bien sûr, à chacun selon ses besoins. Mais le Tribunal fédéral est-il prêt à aller jusque-là ? Dans le cas contraire, il aurait mieux fait de s'abstenir de se fonder sur un principe flou selon ce qui semble relever plus d'une interpétation populaire que d'une réelle réflexion économique ou philosophique.

Mais en attendant une réelle remise en cause de ce principe douteux, le vrai enjeu est celui des taux d'imposition, plus que d'une opposition entre système progressif et dégressif. Le système d'Obwald n'était d'ailleurs que légèrement et partiellement dégressif, ressemblant dans l'ensemble plus à un impôt à taux fixe.

Quitte à se plier à l'exigence irrationnelle de satisfaire à l'arrêt regrettable du TF, il suffirait à Obwald de passer d'un taux légèrement dégressif à un taux très légèrement progressif, plus politiquement correct, mais, cumulé à une baisse du taux moyen, tout aussi à même de préserver son attractivité, dans une région où Nidwald vient tout juste de baisser son taux d'impôt sur la fortune, qui devient ainsi le plus faible de Suisse. La saine dynamique de la concurrence de la région ne s'est pas suspendue dans l'attente de l'arrêt du TF, pas plus qu'elle ne va prendre fin à présent qu'il est rendu. Et c'est bien cela l'essentiel.

juin 2007